Agriculture biologique et transition(s) filières : l'expérience des pionniers

Quelles sont les clés pour faire évoluer les filières agricoles vers plus de résilience et de durabilité ? Comment la bio peut-elle inspirer l’ensemble du secteur, malgré les défis économiques et structurels actuels ?
Pour répondre à ces questions, Christelle Garnier, paysanne bio et administratrice Biocoop, Emilie Lowenbach, directrice RSE et communication chez Ecotone, et Philippe Camburet, président de la FNAB, participent à cette table ronde.

La bio, une histoire de pionniers… et de défis collectifs

L’agriculture biologique, portée depuis près de 50 ans par la FNAB, s’est construite sur la volonté d’agriculteurs de s’affranchir des produits de synthèse et de prouver qu’un autre modèle était possible.

Aujourd’hui, la bio représente environ 10 % des surfaces agricoles françaises, mais traverse une crise de marché qui interroge la résilience des filières et la capacité à organiser la valeur du champ à l’assiette.

Philippe Camburet rappelle :

« La bio, c’est dire stop aux produits chimiques de synthèse, faire confiance aux solutions agronomiques, et s’organiser collectivement pour structurer des filières robustes. »

Coopération et relocalisation : l’exemple de la COCEBI et de Biocoop

Christelle Garnier partage son expérience de paysanne bio dans l’Yonne, engagée dans la première coopérative 100 % bio de France, la COCEBI.

Sa ferme, en polyculture-élevage, valorise la diversité des cultures et la vente directe, tout en confiant l’essentiel de sa production à la coopérative.

La COCEBI, sociétaire de Biocoop, incarne la force du collectif avec près de 290 coopérateurs, 45 espèces cultivées et 40 000 tonnes de céréales récoltées (2023).

Biocoop, c’est aussi un modèle unique où les producteurs participent à la gouvernance, avec 20 groupements sociétaires et 2 700 fermes impliquées.

La relocalisation est une priorité : 87 % de l’offre Biocoop est d’origine France, et des filières comme la moutarde ou le quinoa ont été relocalisées pour renforcer la souveraineté alimentaire.

Ecotone : innover pour la biodiversité et la transition alimentaire

Emilie Lowenbach présente la démarche d’Ecotone (Bjorg, Bonneterre et AlterEco notamment), pionnier de l’alimentation bio et végétale en France et en Europe.

La stratégie du groupe repose sur cinq piliers :

  • Bannir les pesticides chimiques 
  • Développer les alternatives végétales 
  • Diversifier les ingrédients (au-delà des 9 espèces dominantes qui constituent nos assiettes)
  • Lancer des programmes comme Farmtastic pour booster la biodiversité dans les champs
  • Soutenir la restauration des écosystèmes via sa fondation

Le programme Farmtastic, mené avec la COCEBI et Solagro, accompagne les agriculteurs dans la diversification, la couverture des sols et la création d’infrastructures agroécologiques.

Aujourd’hui, 77 exploitations suivent des indicateurs de biodiversité, avec des résultats concrets sur la rotation des cultures et la couverture des sols.

Les défis du marché et de la formation

La table ronde a aussi mis en lumière les difficultés actuelles :

  • Retournement du marché bio depuis 2022, fermeture de magasins, déconversion d’agriculteurs
  • Concurrence du « local » sur le bio, confusion des labels
  • Besoin de reconnecter l’assiette au vivant, de sensibiliser les consommateurs à l’impact de leurs choix
  • Formation agricole encore trop timide sur l’agroécologie et la bio

Pourtant, les intervenants restent confiants : la transition alimentaire est possible, à condition de changer les pratiques, de manger plus végétal, de jeter moins, et de travailler collectivement.

Conclusion : la bio, un laboratoire vivant pour l’agriculture de demain

Face aux défis environnementaux et économiques, l'agriculture biologique continue d'innover et d'inspirer. 

La bio n'est pas seulement un label, mais un écosystème complet qui relie producteurs, transformateurs et consommateurs autour d'une vision commune : celle d'une agriculture respectueuse du vivant et économiquement viable. C'est en continuant à faire "ensemble", comme il a été rappelé tout au long de cet atelier, que la transition agricole pourra s'amplifier et s'ancrer durablement dans nos territoires.

Nous contacter

D’autres articles sur le sujet

Text Link

La filière betterave sucrière : un pilier industriel face aux défis climatiques

La filière betterave sucrière : un pilier industriel face aux défis climatiques
Text Link

Sous nos pieds, un monde vivant : repenser l’agriculture en partant du sol

Sous nos pieds, un monde vivant : repenser l’agriculture en partant du sol
Text Link

Nos sols agricoles : comment préserver et revitaliser ce capital commun ?

Nos sols agricoles : comment préserver et revitaliser ce capital commun ?
No items found.