Identifier les impacts sur la biodiversité dans votre chaîne de valeur agricole
La biodiversité – la variété du vivant sur Terre – constitue le socle des écosystèmes sains. Elle assure des services essentiels pour l’agriculture tels que la pollinisation, la purification de l’eau, la fertilité des sols ou encore la régulation du climat. Pourtant, nous faisons face à une accélération sans précédent de l’érosion de la biodiversité, causée principalement par la conversion des terres, la surexploitation des ressources, la pollution, les espèces invasives et le changement climatique. Le secteur agricole – et l’ensemble des industries qui en dépendent – se trouve ainsi dans une position paradoxale : à la fois acteur majeur de cette érosion et première victime de ses conséquences.
Pour les entreprises, notamment celles des secteurs à forte dépendance aux services écosystémiques (agriculture, forêt, et utilisation des terres – ou FLAG), cette perte de biodiversité se traduit directement par des risques opérationnels, réglementaires et financiers. La transition vers une agriculture respectueuse de la biodiversité devient donc une priorité stratégique !
Dans ce premier article co-écrit avec Darwin Data, nous explorons comment les entreprises liées à l’agriculture peuvent quantifier leurs pressions sur la nature et agir dans leurs zones à forts enjeux de biodiversité.
Les risques liés à la biodiversité pour les entreprises
L’agriculture dépend des écosystèmes – des pollinisateurs aux sols fertiles – mais elle en est également une cause majeure de dégradation. La déforestation, l’épuisement des ressources en eau, la dégradation des sols et la pollution sont directement liés à l’expansion et à l’intensification agricoles.
Pour les entreprises, les conséquences sont multiples :
- Perturbations de la chaîne d’approvisionnement : la perte de pollinisateurs, l’érosion des sols ou la raréfaction de l’eau peuvent réduire les rendements et déstabiliser la production.
- Risques réglementaires : de nouvelles lois, comme le Règlement européen sur la déforestation (EUDR) ou le UK Environment Act, obligent les entreprises à prouver que leurs chaînes d’approvisionnement sont exemptes de déforestation et de destruction d’écosystèmes.
- Risques réputationnels : consommateurs et investisseurs exigent toujours plus de transparence et de durabilité. Les entreprises associées à la perte de biodiversité s’exposent à des boycotts, désinvestissements et pertes d’accès au marché.
- Rentabilité : les risques physiques (sécheresses, ravageurs) et de transition (tarification carbone, compensation biodiversité) peuvent fragiliser la rentabilité des entreprises.

À l’inverse, les entreprises qui évaluent et réduisent proactivement leurs risques liés à la biodiversité sécurisent leurs chaînes d’approvisionnement face aux chocs écologiques, renforcent leur résilience face au changement climatique et à la raréfaction des ressources, tout en accédant à de nouveaux marchés durables et à des financements ESG grâce à des stratégies « nature positives ».
La première étape consiste donc à mesurer son empreinte biodiversité.
Mesurer l’empreinte biodiversité dans l’agriculture
Évaluer son empreinte biodiversité revient à quantifier les impacts de l’entreprise sur la nature et le vivant, à partir de quatre types de données :
- Financières : chiffre d’affaires, données d’approvisionnement,
- Produits : biens transformés, en poids ou en volume,
- Matières premières : commodités standardisées comme le blé ou le soja,
- Pressions environnementales : utilisation des sols, pollution, émissions de GES, etc.,
Les données sont bien sûr collectées à différents niveaux de l’entreprise (unités d’affaires, produits, sites, fournisseurs…).Ces données permettent d’identifier les zones où la chaîne de valeur croise des “points chauds” de biodiversité, par différentes méthodes :
- retracer l’origine des matières premières (ex. soja du Cerrado, cacao d’Afrique de l’Ouest, betterave du Nord de la France) ;
- croiser les cartes de la chaîne d’approvisionnement avec les bases de données sur les hotspots de biodiversité (WWF Global 200, zones de la Liste rouge de l’UICN) ;
- prioriser les régions à risque élevé : là où les opérations ou fournisseurs se superposent à des zones protégées, fronts de déforestation ou bassins hydriques sous tension.
Cartographier les cinq pressions de l’IPBES sur l’agriculture
Une fois les zones sensibles identifiées, il s’agit de mesurer les pressions environnementales exercées par l’entreprise et les services écosystémiques dont elle dépend.
Le cadre de l’IPBES distingue cinq grandes pressions responsables de l’érosion de la biodiversité :
- Changements d’usage des terres : des hectares d’habitats naturels convertis pour l’agriculture.
- Surexploitation directe : surpêche, exploitation forestière non durable, agriculture intensive épuisant les ressources.
- Pollution : ruissellements chimiques, pesticides, engrais, déchets plastiques impactant les espèces locales.
- Changement climatique : hausse des températures, modification des précipitations, événements extrêmes perturbant la production agricole.
- Espèces invasives : ravageurs ou plantes exotiques perturbant les écosystèmes et augmentant les coûts agricoles.
Comprendre ces pressions permet aux entreprises de cibler leurs risques et d’orienter leurs actions de manière efficace.
Évaluer les dépendances aux services écosystémiques
Les entreprises liées à l’agriculture n'ont pas seulement un impact sur la biodiversité, elles en dépendent également à travers les services écosystémiques. Nous pouvons classer ces services en quatre catégories afin d'aider les entreprises à identifier leurs dépendances critiques et leurs opportunités stratégiques :
- Les services d'approvisionnement
Les ressources tangibles telles que l’alimentation, l'eau et certaines matières premières sont essentielles à beaucoup de modèles économiques.
Par exemple : une plantation de café dépend d'un approvisionnement stable en eau et des grains Arabica, qui dépendent des pollinisateurs, donc de la biodiversité.
- Les services de régulation
Les processus naturels comme la pollinisation, la régulation climatique et la lutte contre les parasites maintiennent la productivité des sols.
Par exemple : les vergers dépendent des abeilles pour la pollinisation et de sols sains pour le cycle des nutriments.
- Les services culturels
Ce sont là des avantages immatériels tels que l'agro-tourisme, le patrimoine et la valeur de la marque.
Par exemple : le paysage pittoresque d'un vignoble attire les touristes, mais risque de se dégrader en raison de pratiques non durables.
- Les services dits “de soutien”
Des processus fondamentaux tels que le cycle des nutriments et la dispersion des graines sont essentiels pour les autres services écosystémiques
Par exemple : une entreprise forestière dépend de la régénération naturelle des forêts, menacée par les plantations en monoculture.

Avec une vision claire de son empreinte biodiversité, une entreprise peut prioriser les matières premières et fournisseurs à risque, fixer des objectifs fondés sur la science pour réduire les impacts sur la biodiversité, impliquer ses fournisseurs dans des pratiques durables (agroforesterie, agriculture de précision, agroécologie, etc.).
Pour vous aider dans cette tâche, Darwin Data met à votre disposition une plateforme qui vous permet de collecter et de gérer automatiquement les données relatives à la biodiversité afin de vous aider à localiser les impacts et les dépendances, les risques opérationnels et à mettre en œuvre des plans de transition concrets. Si vous avez besoin d'aide pour faire évoluer votre modèle économique vers un modèle positif pour la nature, n'hésitez pas à contacter Darwin ici !
De la mesure à l’action : le rôle des Certificats Biodiversité
Notre modèle agricole doit évoluer vers des pratiques plus durables et favorables à la biodiversité. Mais les agriculteurs et agricultrices ne peuvent pas assurer cette transition seul·es. Tous les acteurs de la société ont un rôle à jouer dans la transition agroécologique, et notamment les entreprises.
C’est dans cette optique qu’Agoterra, acteur de référence dans le financement de la transition agroécologique, et Noé, ONG experte en biodiversité, ont développé une innovation majeure pour permettre aux entreprises de s’engager pour la biodiversité : les Certificats Biodiversité.

L'agriculture : responsable, victime et solution face à l'érosion de la biodiversité
L'agriculture est responsable d’une partie de l’érosion de la biodiversité. Les Certificats Biodiversité visent à mesurer et valoriser l’impact de la transition d’un agriculteur vers une agriculture régénératrice. L’impact d’une telle transition est mesuré à quatre niveaux :
🦋 Habitat : Les pratiques agricoles actuelles sont responsables d’une grande partie de la perte d’habitats naturels. La transition vers une agriculture régénératrice permettrait d’arrêter ce processus, notamment par la plantation de haies, de bandes enherbées ou par l’agroforesterie.
🦋 Prélèvements : Les sols agricoles sont surexploités dans le système agricole actuel. Au contraire, laisser des résidus de culture ou installer des cultures de couverture pour produire de la biomasse contribue à maintenir la vie du sol.
🦋 Changement climatique : L’agriculture est responsable d’un quart des émissions mondiales actuelles de GES, mais en adoptant une agriculture régénératrice, nous pouvons non seulement réduire les émissions agricoles (pesticides, engrais chimiques, etc.) mais aussi accroître la séquestration du carbone dans les sols en réduisant le travail du sol.
🦋 Pollution : Les pesticides et les engrais azotés peuvent avoir un impact significatif sur la destruction des écosystèmes et peuvent être remplacés par des amendements organiques et la plantation de légumineuses pour enrichir le sol en azote.
Les certificats biodiversité offrent donc une manière rigoureuse de mesurer (et de récompenser) l’impact d’une transition agroécologique sur la biodiversité locale.
Dans le cadre de l’Organization for Biodiversity Certificates (OBC) et complémentaires des crédits carbone encadrés par le Label bas-carbone (LBC), les Certificats Biodiversité visent à faire de la préservation de la biodiversité un pilier concret et mesurable de la stratégie climat des entreprises.
Une approche robuste, innovante et collective
Les Certificats Biodiversité reposent sur une méthodologie fondée scientifiquement, validée par un comité d’experts indépendants et alignée avec les cadres internationaux (Crédits Nature européens, IAPB, OBC, etc.). Chaque certificat reflète une contribution réelle, additionnelle et mesurable à la régénération de la biodiversité, en complément des efforts de réduction d’empreinte carbone.
Ce dispositif pionnier se distingue également par son approche collective : co-développement avec les acteurs de terrain, implication des parties prenantes locales, et engagement de plusieurs entreprises pionnières.
Des projets pilotes sont déployés sur le territoire français pour évaluer l’impact des pratiques agricoles sur la biodiversité et la juste rémunération des agriculteurs pour leur mise en place.
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Vous voulez en savoir plus sur les certificats biodiversité ? Rejoignez le collectif !




