Filière vin : exemples de transition agroécologique avec Advini et Oé

Comment concilier climat, biodiversité et engagement social dans les vignobles ? Quels enseignements concrets tirés du terrain, et quels modèles d’accompagnement pour faire bouger l’ensemble de la filière ? 
C’est ce que nous avons exploré lors de l’événement CarbonConnect, au cours d’une table ronde animée par Pauline Maisonneuve (Agoterra), en présence de Carmen Etcheverry (Advini) et Sophie Cucheval (Oé).
Loin des clichés sur une filière figée, la viticulture à commencé sa transition et a bien conscience des enjeux environnementaux auxquels elle fait face. De la mesure de l’empreinte carbone à la valorisation de la biodiversité, en passant par les transformations sociales et logistiques, cet échange révèle la diversité d’approches engagées sur le terrain. Focus sur deux modèles très différents — Advini et Oé — unis par une même volonté : faire évoluer les pratiques, sans dogmatisme, mais avec méthode et sincérité.

Une filière déjà très engagée dans la transition

Dès l’ouverture de la table ronde, Pauline, responsable filières chez Agoterra, le rappelle : contrairement aux idées reçues, la viticulture est en première ligne sur les enjeux de transition. « On reçoit de plus en plus de demandes directement de la part de viticulteurs, bio ou non. Il y a une vraie volonté d’agir. »

Advini : une stratégie climat à l’échelle des domaines

Carmen Etcheverry, Directrice Durabilité, Qualité & Communication chez Advini, revient sur le virage climat engagé par le groupe. Présent en France et à l’international avec 30 domaines (Laroche, Gassier, Cazes, etc.), Advini a longtemps structuré sa politique RSE autour du social et de la biodiversité. Mais sur le climat, un travail de fond restait à faire.

La réalisation d’un bilan carbone complet a été un tournant. Résultat : plus de 80 % des émissions proviennent des produits eux-mêmes, pas des bureaux ni du numérique. « Ce diagnostic nous a permis de prioriser les actions là où ça compte : dans les vignes, les pratiques culturales, les achats de bouteilles, la logistique. »

Advini a fait le choix d’un accompagnement individualisé par domaine, en tenant compte des spécificités : bio, conventionnel, HVE, etc. Un point essentiel selon Carmen : « Il faut un langage commun et une grille de lecture partagée, sans imposer un seul modèle. »

Oé : sobriété, consigne et biodiversité au cœur du modèle

Sophie Cucheval, cofondatrice d’Oé, présente une structure radicalement différente. Oé ne possède ni vignes ni cave. L’entreprise lyonnaise collabore avec une dizaine de vignerons et vigneronnes en bio, pour créer ensemble des cuvées responsables.
Trois piliers structurent leur action : 

  • l’accompagnement agronomique
  • la sobriété carbone
  • la sensibilisation du grand public

Leur bilan carbone a confirmé une intuition : 47 % de l’empreinte carbone d’une bouteille de vin Oé vient du verre. Ce chiffre a déclenché le déploiement d’un système de consigne, avec 60 % de taux de retour à Lyon, et des tests de bouteilles allégées. « Ce n’est pas une campagne de communication qui change les choses, ce sont les chiffres. On savait que la bouteille pesait lourd, mais là, on avait une preuve. Ça nous a aidés à convaincre nos partenaires, à mutualiser, à tester des alternatives.»

Le climat, mais pas que : réconcilier viticulture et vivant

La transition bas-carbone ne peut se faire sans un lien fort au sol, à la biodiversité et au territoire.

Chez Advini, un programme dédié, “Act for Biodiversity”, permet à chaque domaine de réaliser une auto-évaluation environnementale, d’identifier les zones sensibles et d’adapter les pratiques (haies, traitements, couverts). Ce long travail redonne du sens aux équipes.

Chez Oé, la biodiversité est « au cœur de tout ». Sophie raconte les changements observés : retour des insectes, des odeurs, de la microfaune. Un vigneron de Chusclan a par exemple planté des haies en lien avec une association naturaliste et des écoles locales. « Ça recrée du lien entre nature, territoire et société. »

Labels, communication et attentes des consommateurs

Face à la multiplication des labels (bio, HVE, Terra Vitis, etc.), la lisibilité devient un enjeu.
Advini ne fixe pas de cadre unique, mais accompagne chaque domaine selon son contexte. « Il y a une vraie confusion côté consommateur. Il faut réexpliquer ce qu’il y a derrière les logos. »
Oé, de son côté, mise sur la transparence et la narration directe : QR codes, vidéos, réseaux sociaux pour valoriser les gestes et les engagements réels.

Gouvernance et inclusion : penser aussi le facteur humain

Un volet souvent oublié des stratégies climat est la gouvernance. Qui décide ? Qui est inclus ?
Chez Advini, le sujet est désormais intégré à la feuille de route RSE. Management participatif, conditions de travail, reconnaissance des saisonniers, comité climat multi-métiers : « Ce sont souvent les techniciens qui font avancer les choses. »
Chez Oé, la démarche est portée par la gouvernance partagée (statut de société à mission, label B Corp) et un travail actif sur la féminisation du secteur, en partenariat avec des associations.

Conclusion : construire la transition par la coopération

Pauline conclut : la transition ne peut pas se faire sans sincérité, écoute et coopération.
Carmen insiste : « Ce ne sont pas les injonctions qui font bouger les lignes, mais les exemples. »
Sophie résume en une phrase :

« Le vin, c’est un produit de culture. Si on veut que cette culture survive au changement climatique, il faut qu’elle soit vivante, inclusive, et enracinée. »

Nous contacter

D’autres articles sur le sujet

Text Link

La filière betterave sucrière : un pilier industriel face aux défis climatiques

La filière betterave sucrière : un pilier industriel face aux défis climatiques
Text Link

Sous nos pieds, un monde vivant : repenser l’agriculture en partant du sol

Sous nos pieds, un monde vivant : repenser l’agriculture en partant du sol
Text Link

Nos sols agricoles : comment préserver et revitaliser ce capital commun ?

Nos sols agricoles : comment préserver et revitaliser ce capital commun ?
No items found.