Vers un Indice de Contribution des entreprises à la neutralité carbone
Comment réconcilier ambition climatique, transparence et impact réel ? Et comment sortir des logiques de compensation et de reporting pour aller vers une contribution climatique tangible et collective ?
C’est le cœur de l’échange mené lors de cette conférence à CarbonConnect, entre Sweep, à l’initiative d’un indice de contribution open source, et Veolia, groupe engagé dans la transformation écologique. À travers cette discussion entre Renaud Bettin (Sweep) et Mathieu Tolian (Veolia), se dessinent les limites des approches actuelles autour du Net Zéro, mais aussi des pistes opérationnelles pour basculer vers une stratégie climatique plus exigeante, plus systémique et réellement porteuse de sens.

Le Net Zéro : un objectif aux contours flous
Le terme Net Zéro s’est imposé dans les trajectoires climat des entreprises. Mais derrière cet étendard, une question dérange : que recouvre-t-il vraiment ?
“Aujourd’hui, on peut dire qu’on est Net Zéro sans avoir encore commencé à réduire quoi que ce soit. On peut continuer à émettre, tant qu’on compense. Ça pose un vrai problème de crédibilité.” – Renaud Bettin, Sweep
Cette approche comptable et abstraite s’appuie massivement sur des compensations, parfois déconnectées de l’activité réelle de l’entreprise. Résultat : la cohérence et l’efficacité climatique sont souvent sacrifiées au profit d’une communication performative.
Veolia, en tant qu’acteur industriel de terrain, partage ce constat :
“Nous avons voulu prendre du recul sur cette course au Net Zéro. Le climat n’est pas une ligne dans un rapport, c’est un système à régénérer.” – Mathieu Tolian, Veolia
L’indice de contribution : un outil pour changer de paradigme
C’est dans ce contexte qu’est né l’indice de contribution open source, développé par Sweep et ses partenaires (notamment Agoterra). L’objectif : donner aux entreprises un cadre concret, structurant et transparent pour évaluer leur contribution réelle à l’effort climatique mondial.
Un indice qui s'appuie sur 4 dimensions :
- Ambition : l’entreprise vise-t-elle la réduction effective de ses émissions ?
- Crédibilité : la trajectoire est-elle réaliste, chiffrée, suivie ?
- Action : des mesures concrètes ont-elles été mises en place ?
- Collectif : comment l’entreprise embarque-t-elle son écosystème (fournisseurs, clients, territoires) ?
Contrairement aux notations internes ou aux labels propriétaires, cet indice est public, ouvert à la critique, et perfectible. Il vise à installer une culture de l’amélioration continue et du débat, plutôt que de la conformité.
Passer de la stratégie climat au passage à l’action
Veolia a choisi de s’appuyer sur cette démarche pour revoir sa stratégie climat, avec deux principes clés :
- Priorité à la réduction réelle des émissions, y compris les scopes 3 ;
- Volonté d’embarquer ses partenaires et territoires dans une dynamique de transition.
“On ne parle pas d’un objectif à 2050. Ce qu’on veut mesurer, c’est l’impact réel qu’on a aujourd’hui, année après année. Et comment on progresse collectivement.” – Mathieu Tolian
Cela suppose une transformation en profondeur des outils internes, des arbitrages d’investissement, des chaînes d’approvisionnement. Mais aussi un effort de pédagogie, pour redonner du sens aux actions mises en œuvre.
Ce que l’indice change concrètement pour les entreprises
Loin d’être un outil supplémentaire, l’indice de contribution permet de réaligner les pratiques avec les objectifs climatiques, en posant des questions simples mais puissantes :
- Est-ce que je réduis mes émissions à la bonne vitesse ?
- Est-ce que mes actions climat sont à la hauteur de mes ambitions ?
- Est-ce que je contribue réellement à une transition systémique, au-delà de mon périmètre direct ?
“On est passés d’une logique de preuve à une logique de contribution. Ce qui compte, ce n’est pas ce que je dis faire, c’est ce que je permets au système dans lequel j’évolue de faire.” – Renaud Bettin
Un enjeu collectif, au-delà des bilans carbone
Ce changement de regard implique de sortir de la logique de performance individuelle pour penser en termes de contribution collective.
Pour Veolia, cela veut dire, par exemple :
- développer des offres bas carbone avec ses clients industriels,
favoriser la réutilisation d’eau ou la production d’énergie renouvelable à partir de déchets, - soutenir la transition des fournisseurs dans les territoires.
C’est une écologie d’action, incarnée, territorialisée, qui s’éloigne des standards abstraits pour rejoindre les réalités du terrain.
Conclusion : Et maintenant, comment embarquer ?
L’indice de contribution n’est pas un label. C’est un outil de dialogue et de pilotage, conçu pour évoluer, être questionné, et s’adapter aux secteurs.
Son objectif ? Aider les entreprises à reprendre la main sur leur stratégie climat, dans une logique de transparence, d’engagement, et d’impact partagé.
À travers cette démarche, Veolia comme Sweep montrent qu’il est possible – et nécessaire – de changer les règles du jeu, pour faire du climat non plus un cadre de reporting, mais un véritable levier de transformation.